Amplificatum! – Décortiquons le premier Spider-Man, de Sam Raimi

Yannis Fardeau

Quels éléments cinématographiques du premier film de la trilogie SPIDER-MAN de Sam Raimi viennent directement des comics ?

Quels éléments cinématographiques viennent directement des comics ? Est-ce une adaptation, une réécriture, ou une réappropriation ? Décortiquons le premier SPIDER-MAN de Sam Raimi ! 

© Marvel Entertainment, Sony Studios

1️⃣ LHISTOIRE, ET SES LIENS AVEC LES COMICS

Peter Parker est un jeune orphelin vivant chez son oncle et sa tante. Que dire de lui, en dehors que ce n’est qu’un adolescent comme les autres, menant une vie de lycéen ordinaire ? Peter est un amoureux de science, et fou de sa voisine Mary-Jane Watson. C’est lors d’une sortie scolaire dans un laboratoire scientifique Columbia que sa vie bascule : une araignée, modifiée génétiquement, le mord… lui conférant des pouvoirs de type arachnéen. 

Cet élément, sur lequel la trilogie commence, sort tout droit de la saga ULTIMATE SPIDER-MAN, un reboot des comics originaux dans univers alternatif, sorti au début des années 2000 pour remettre l’histoire au goût du jour. Dans le comic-book, la sortie scolaire n’est pas dans un laboratoire de Columbia mais d’Oscorp.

Extrait de ULTIMATE SPIDER-MAN #1 (2000), dessins de Mark Bagley © Marvel

Pendant ce temps, la société Oscorp est financée par l’armée afin de mettre au point de nouvelles armes. Norman Osborn, P.D.G de la boite, travaille d’arrache-pieds sur une formule pouvant créer des super soldats : des humains 2.0 plus forts, plus intelligents, équipés d’un planeur révolutionnant. Selon le Docteur Stromm, collègue d’Osborn, il faudrait remanier la formule car les sujets montrent une puissante agressivité et une aliénation/dédoublement de la personnalité. Norman décide d’utiliser la formule sur lui-même, le transformant en Green Goblin (Bouffon Vert en VF). Sa nouvelle personnalité le pousse alors à tuer le Docteur Stromm, et à voler le planeur. 

Cet élément est en fait un mélange de la série AMAZING SPIDER-MAN (version originale), et de la série ULTIMATE SPIDER-MAN. Dans la série AMAZINGOsborn travaillait avec Stromm afin de lui voler ses recherches. Après avoir trouvé des notes sur une expérience inachevée, il décide de la recréer… Mais une erreur de calcul fait tout péter, transofmant ainsi Norman Osborn en Green Goblin. Dans la version ULTIMATE, par contre, il s’injecte le sérum d’OZ (utilisé sur l’araignée ayant mordu Peter) pour acquérir les mêmes capacités que le Tisseur.

La version classique du Green Goblin, par Mike Deodato Jr. © Marvel

La découverte des super-pouvoirs est très différente entre le film et les comics. Alors qu’il découvre ses toiles d’araignée organiques (invention pour le film) dans le réfectoire du lycée, Peter envoie accidentellement un plateau sur Flash Thompson, un camarade de classe, qui décide de se venger avec ses poings. Mais les sens surdéveloppés de Peter parviennent à le mettre en garde face au danger, dans un monde qui tourne au ralenti: Son Spider-Sense. Il s’enfuit alors de l’école et, comprenant qu’il a des super pouvoirs type arachnéens, tente de grimper à un mur.

Dans la série AMAZING SPIDER-MAN, une voiture manque d’écraser Peter, qui ressent le danger et saute pour l’esquiver. Sa force décuplée le projette plus loin qu’il le pensait, et le jeune homme  se retrouve accroché à un mur, qu’il escalader à l’image d’une araignée. Quant à la série ULTIMATE, Peter découvre son Spider-Sense alors que Kong ─ un ami de Flash Thompson ─ essaye de le frapper dans les couloirs du lycée, élément dont Sam Raimi s’est inspiré pour le film, et il découvrira un peu plus tard ses capacités d’araignée lors d’une « dispute » avec son oncle, où il restera « scotché » au mur.

Extrait de ULTIMATE SPIDER-MAN #1 (2000), dessins de Mark Bagley © Marvel

La famille Parker est très pauvre… et Peter est à l’âge où il souhaite impressionner Mary-Jane, son amour de toujours. C’est ainsi qu’il accepte de faire du catch en échange de 3 000$ pour 3 minutes dans un ring, et remporte le combat en seulement 2 minutes. Le président de la fédération de catch profite donc de l’occasion pour l’arnaquer, et lui donne seulement 100$. Et c’est là qu’intervient Dennis Carradine, un braqueur notoire venant dérober la fédération de catch.  Peter, énervé par l’arnaque dont il est victime, refuse d’arrêter Carradine. Mais toutes les actions ont des conséquences… cet homme tuera Ben Parker afin de lui voler sa voiture.

Dans les comics, c’est approximativement la même chose au sujet du catch, bien que Peter soit resté un assez long moment en tête d’affiche, devenant une véritable superstar. Par contre, le décès de Ben Parker est totalement différent. Dans l’univers Marvel classique, Dennis Carradine braque bel et bien la fédération de catch, puis il cambriole le domicile des Parker et tue l’oncle Ben. Dans l’univers Ultimate, c’est un épicier qu’il braque avant de cambrioler le domicile des Parker (version qui sera adaptée dans le film THE AMAZING SPIDER-MAN). Peter décide alors de dédier ses pouvoirs au bien et à la justice.

ℹ️ C’est le narrateur de l’univers Marvel classique qui cite Voltaire via la maxime « Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités », et non l’oncle Ben.

Peter face à l’assassin de son oncle (AMAZING FANTASY #15, 1962), dessins de Steve Ditko © Marvel

Faisons un bref saut dans le temps… En dehors de la collocation Peter/Harry Osborn tirée des comics AMAZING SPIDER-MAN, et le travail au Daily Bugle, le film ne suit pas la trame des comics. Nous voici donc à la première apparition du Green Goblin, en plein milieu d’une fête à Manhattan. Spider-Man arrive à le vaincre en abîmant son planeur.

Peter Parker (Tobey Maguire) © Marvel Entertainment, Sony Studios

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Dans la série AMAZING SPIDER-MAN, lors de sa première apparition, le Green Goblin n’utilisait pas un planeur mais un balais volant (le planeur viendra lors de l’apparition suivante), où il attaque la fête d’ouverture du Spider-Man Club de Forest Hills. Il se peut fortement que cette scène s’inspire de la soirée d’ouverture du Spider-Man Club.

Tout comme dans l’univers Marvel classique, Norman Osborn a deux âmes différentes, deux personnalités distinctes: Norman Osborn, et le Green Goblin, et les deux personnages partagent une seule et même intelligence accrue et surtout au dessus de tous les autres ennemis du Tisseur. C’est ainsi qu’il ira attaquer le Daily Bugle pour trouver « celui qui prend des photos de Spider-Man » , et le Tisseur se fait anesthésier par un gaz conçu par le Goblin.

Peter Parker (Tobey Maguire) face au Green Goblin (Willem Dafoe) © Marvel Entertainment, Sony Studios

Du côté de l’univers Marvel classique (Terre-616), dans AMAZING SPIDER-MAN #39 (paru en 1966), le Green Goblin met au point un gaz capable d’anesthésier son Spider-Sense, dans le but de prendre Spider-Man en filature et découvrir son identité secrète.

AMAZING SPIDER-MAN #39 (1966), couverture de Steve Ditko © Marvel

La découverte de l’identité secrète du Tisseur dans le film est due à un feu d’appartement, où le Green Goblin lui tend un piège. Ce dernier blessera Spider-Man au bras, et constatera ensuite que Peter a la même blessure.

Norman Osborn (Willem Dafoe) © Marvel Entertainment, Sony Studios

Le Green Goblin, sachant enfin qui est Spider-Man, décide de l’attaquer dans sa propre maison, ce qui provoque une crise cardiaque chez May Parker. Cet élément est également inspiré de la soirée du Spider-Man Club, où le Tisseur a dû abandonner son combat contre le Green Goblin pour secourir May qui faisait une crise cardiaque.

Lors de l’acte final, le Green Goblin kidnappe Mary-Jane et attire le Tisseur sur le pont de Brooklyn… Le choix est simple, Mary-Jane et une télécabine pleine d’enfants sont jetés dans le vide, poussant Spider-Man à choisir qui sauver, élément inspiré de la mort de Gwen Stacy dans le comic-book « TURNING POINT » (AMAZING SPIDER-MAN (1963) #121).

Affaibli par un combat intense, Osborn ordonne alors à son planeur d’empaler le Tisseur par derrière. Averti par son Spider-SensePeter esquive l’engin qui empale le Bouffon, victime de son propre machiavélisme… Ce passage est repris quasiment à l’identique du comic-book « DEATH OF GREEN GOBLIN » (AMAZING SPIDER-MAN (1963) #122).

Le piège de Norman Osborn se retourne contre lui (AMAZING SPIDER-MAN #122) , dessins de John Romita Sr. © Marvel
La mort de Norman Osborn (Willem Dafoe) © Marvel Entertainment, Sony Studios

2️⃣ LES EASTER-EGGS

Quand Peter dessine des prototypes de costumes, nous voyons un costume particulier: il s’agit de Stingray, un super-héros Marvel !

© Marvel Entertainment, Sony Studios
© Marvel

Juste après la morsure de l’araignée au laboratoire Columbia, nous voyons sur un écran une liste des pouvoirs de Spider-Man.

© Marvel Entertainment, Sony Studios

Lors de la découverte de ses pouvoirs et essayant de tisser une toile, Peter crie « SHAZAM! », référence au personnage du même nom chez DC Comics, dont Sam Raimi est fan. D’ailleurs, en VO, Tobey Maguire crie ce mot avec la même intonation que Frank Coghlan Jr., interprète de Billy Batson dans la série ADVENTURES OF CAPTAIN MARVEL de 1941. Toujours dans cette scène et en VO, Peter dit « Up, up and away » , qui est une réplique phare de Superman lorsqu’il s’envole.

Peter Parker (Tobey Maguire) © Marvel Entertainment, Sony Studios
Billy Batson (Frank Coghlan Jr.) © DC, Republic Pictures

✪ Sam Raimi ne le cache pas, son super-héros préféré est, et a toujours été Superman.  Lorsque le Green Goblin attaque la fête, Peter court en déboutonnant sa chemise comme Clark Kent le fait, laissant apparaître le symbole araignée de son costume comme le S de Superman apparaît.

Peter Parker (Tobey Maguire) © Marvel Entertainment, Sony Studios
Superman, par Gary Frank © DC Comics

Superman est également mentionné par May Parker, quand Peter veille sur elle à l’hôpital suite à sa crise cardiaque.

May Parker (Rosemary Harris) © Marvel Entertainment, Sony Studios

Le repas de Thanksgiving offre un plan en hommage à la peinture de Norman Rockwell, Freedom from Want, sortie en 1943.

© Marvel Entertainment, Sony Studios

3️⃣ ADAPTATION, RÉINTERPRÉTATION, OU RÉAPPROPRIATION ?

Ayant eu une liberté créative quasi totale, Sam Raimi signe son premier film de super-héros avec légèreté et nous offre l’un des plus grands classiques du cinéma de super-héros, et ce n’est pas anodin: En plus de la qualité de réalisation des plus exquises et des acteurs talentueux amoureux de leurs personnages, Sam Raimi nous offre également un film respectant énormément le matériel de base sans pour autant en être une copie conforme. Ce n’est pas une simple adaptation, mais une réinterprétation des comics, l’interprétation exclusive de Sam Raimi sur le personnage, mélangeant avec perfection les différents gros univers du TisseurAMAZING SPIDER-MAN et ULTIMATE SPIDER-MAN.

© Marvel Entertainment, Sony Studios

La version vidéo

L'AUTEUR

YANNIS FARDEAU

Co-fondateur de COMIX'TRÊME ─ fana de Stephen King, Potterhead, et passionné de blagues Carambar. Collectionne des alpagas (vivants) pour devenir maître du monde et, objectivement, manger des glaces.

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